L'Indicible
23 septembre 2004
 

Under my skin

Les bambous flottent sur nos têtes.
Les ombres du soir grandissent ta peau nue.
Je cherche le vide où tu n’existes pas.
Dedans est trop plein de toi.
Je remue les forêts les broussailles, ne peux comprendre une telle présence.

Je parle à la fille au regard clair, l’entraîne dans mon désert, un chemin sans repères.
Juste des mots écrits à la bouche pleine du fleuve
Cela coule ruisseau, torrent….
La lune décline les heures sur nos mains, les doigts accrochent quelques étoiles juste pour éclairer l’ombre insupportable.
Tu es long et dur, je change de côté.
On range les robes lourdes de tant d’errances dans les paniers d’osier.
Les couleurs dans ta bouche me renvoient dans la nuit.
J’ai collé l’or et le bleu entre tes yeux, même ton dos m’arrache le ventre.
J’ai besoin tu prends tout l’espace.
La guerre en dedans.
Une autre rivière glisse sur tes jambes
Un serpent se déroule dans les secret de tes cuisses avant de rentrer dans le mur, on y lit encore «plus jamais ça» sur le rose de la pierre.
Trop de convulsions sur la page
Dehors est gris aujourd’hui, il cherche sur internet du travail.
Dans nos gorges les mots se décomposent, se découpent, mille mots et on n’aura même pas dit le pourquoi de cette vie.
Je garde la lettre, les dessins dans le trou du mur.
Partout on tue, lapide, égorge, assassine et pourtant la vie continue.
On vient de la même côte et on ne parle pas la même langue, les mots ne percutent pas, tu laisses Babel s’effondrer, tu as le dernier mot, je ne sais pas répondre.
J’écoute les silences, la musique du ventre, je garde en dedans les temps de sable.
On fera une machine, on lavera tous les linges, je regarderai tes chemises se détacher dans le ciel, les voiles blanches et bleues battront au vent, un parfum de jasmin, la corde sera pleine, il manquera des épingles.
Je suis sentimentale, le bleu m’enivre encore, je ne sais qui a tiré le premier, je reste collée à l’air, les bouteilles vides contre les voliges.
Elle a déjà vu la scène, les portes qui s’ouvrent la fille au regard clair arrive son sac à l’épaule, lui pénètre par la porte de derrière, elle danse légère, l’automne et ses mystères, je n’oublie pas les anniversaires.

 
22 septembre 2004
 

Jamais, toujours

j'écris souvent jamais, toujours et ce soir il me dit ( ce n'est pas de lui mais de qui ? , il a oublié : l'infini c'est long surtout vers la fin, oui l'infini ou l'éternité c'est long.
je voulais écrire mon courrier , mes lettres, celles que j'écris dans ma tête, peut-être demain , j'écris ces lettres.

 
17 septembre 2004
 

Trop loin

Trop vide pour dire à quel point tout cela manque effroyablement et tu passes l’aspirateur même dans la cuisine, trop vide pour dire ce dernier matin les yeux au loin sans plongée ni contre plongée, ta main effleure le bois mon bras, je m’en meurs de tant de vide, la béance dense, je cherche la multiplication avec le pain et le vin.
Le corps sait mais la tête n’est jamais sûre, est-ce une plainte, une prière, de la douleur, une apnée, le souffle coupé, et l’oiseau dans le corps cherche une envolée, s’échappe du bosquet quand tu passes.
J’aimerais pouvoir prendre ma solitude sans toi, sans vous, sans lui,l’occuper, l’habiter avec un verre de vin, au loin là-bas, il n’y a que toi qui puisses comprendre tu es si loin dans les stratosphères où personne n’erre et pourtant c’est si bon.
Il y a Noa et son one voman show, je ris à en pisser dans la culotte.
Et on ne fera que cela, on allumera toutes les bougies toute la nuit et le jour aussi.
Et ce soir, j'aimerais un amant taxi (comme Camille (around the world)) pour m'amener à l'anniversaire.

 
14 septembre 2004
 

Une photo dure et belle

Je regarde les photos de N, une photo me bouleverse, elle me la donne, cela se passe dans une salle à manger d’un hôpital psychiatrique, le carrelage noir et blanc, le plafond gris, de la lumière sur les bols vides transparents, sur une table et sur une chaise, trois personnes, un homme contre un pan de mur les bras croisés, un autre assis dans un coin le menton et la bouche dans sa main pensif, songeur et ce qui me trouble le plus cette fille, femme, enfant un peu décalée devant l’homme contre le mur, une bouteille d’eau à la main comme un biberon un nounours, elle s’agrippe à la bouteille l’autre bras ballant le long du corps elle porte une jupe blanche, ses petites jambes dépassent, un rai de lumière dans le bas de la jupe, son visage est un peu flou, elle semble hébétée loin et tellement là, la photo suspend le moment là, un temps qui semble déjà suspendu depuis longtemps, des gens en attente de rien, de tout que peut-il arriver pour que la vie reprenne son cours pour que la fille à la jupe blanche pose la bouteille et aille courir dehors que l’homme contre le mur décroise les bras pour que l’homme qui songe parle.
Je pose des mots, je suppose que.......,je ne sais pas, cette photo me fascine et bouleverse, je la regarde depuis ce martin, je ne peux m’empêcher de la regarder et de penser à la place d’eux, j’écris eux qui n’écriront peut être jamais sur le web et pourtant ce qui se vit en dedans d’eux m’intrigue et cela je ne l’écrirai pas.

 
06 septembre 2004
 

Dérive au bord du fleuve

Je traverse une nouvelle fois le pont, le vent chaud sur la peau, les bourrasques dans mes cheveux, les feuilles des arbres tremblent et s’envolent je marche vite, je poursuis ma route, cela ressemble au chemin des Incas, les pierres, les signes, les traces, les dessins, toutes ces écritures, des lignes, des marques sur les murs, des planches peintes, des creux, des plis dans la ville, le chemin du temps, les vestiges, le labyrinthe des ruelles, les carriéras avec les fontaines, les arènes.
Je devine au loin ton corps vêtu de tant de nonchalance, tant de désinvolture dans tes mains, tes lèvres près de moi goûtent l’encre des pinceaux, tes lèvres près de moi réveillent d’autres couleurs, ton regard met à nu la lumière, tes bras me ralentissent, je suis lente à tes côtés, je savoure l’infime instant, j’en connais trop sa rareté précieuse.
Un blues dans les branches des arbres me donne envie de danser juste pour toi, tu suis mes pas sur l’asphalte, ton regard transperce ma peau, je te frôle, tu me touches, nos cheveux s’emmêlent, nos corps ondulent, mouvement de nos eaux dans l’air, le feu dehors, dedans escalade. Tu me dis qu’un jour………., je te dis chut, écoute la musique, la guitare, l’harmonica la voix noire du vieux joueur de blues, écoute c’est pour nous. Tu comprend s que c‘est peut-être cela, notre capacité à entendre les silences, à pénétrer les vides, à allumer tous ces obscurs.
Je vois la jolie femme assise sur le banc,elle me sourit la jolie femme qui attend.
Je dis : cela n’a pas d’importance, on ne se doit rien et puis surtout on ne se promet rien.
Je prends ta main, tu fermes les yeux, nos doigts longtemps laissent couler l’eau du monde.
Je sais que dans le matin tu rejoindras la fille aux yeux clairs qui attend sur le banc , tu me quitteras, tu me regarderas à peine, les yeux bas, ton visage sera quelconque, insignifiant, je partirai avec ton regard lâche dans le dos, tu sais je ne t’aime pas quand tu es comme cela et pourtant je reviendrai, je retraverserai le pont, je regarderai l’eau, je serai émerveillée encore par la couleur, tous ces reflets et étonnée encore que mon cœur batte si fort

 
02 septembre 2004
 

De la mort

La maladie grave nous amène là où l’on ne sait pas, où même les médecins ne savent pas soigner guérir.
Et c’est un gouffre un précipice un désespoir intense, voir ceux que l’on aime, ceux qui partagent notre vie souffrir est insupportable, intolérable.
On se retrouve seul impuissant face à soi-même et ses pulsions de vie et mort ses impuissances, on se bat comme on peut pour accepter et vivre l’impossible.
Essayer de vivre chacun des instants le mieux possible constater avec peine la dégradation du corps les souffrances la douleur, les accepter c’est le début du processus du deuil peut-être, voir l’autre plus loin que son corps, voir et aimer plus que jamais ton regard, ta façon d’être au monde ton courage.
Et la mort vient inéluctable et la solitude, l’effrayante solitude, plus jamais nos mains liées plus jamais ensemble physiquement avec nos corps.
Ouvrir une fenêtre sur un ailleurs inconnu, subtil et plein de mystères, voir des signes dans le rien, et vivre encore aller au plus profond de moi, trouver des ressources ignorées.
Et peut-être ta mort me révèle encore plus dans la danse, le mouvement de mes pas, dans ces rencontres improbables avant, dans mon cheminement le long du fleuve.
Je marche vers la mer cela ressemble à une errance, j’évacue un peu de la souffrance et je comprends que seule je mourrai, seule je vis malgré de belles rencontres tous ces moments magiques tous ces cadeaux du ciel.
Grâce à toi, à ta mort j’ose aller plus loin, je prends des risques, me lance de vrais défis et ose encore aimer.
Il y a toujours ces soirs chaotiques où au fond d’un abîme sans fond je plonge et des matins où mes larmes voilent le miroir, des matins où je m’étale vulnérable sur le sol au bord de ta mort.

Je m’allonge sur le pont de bois je regarde danser la lumière sur l’arbre, je vois le bleu du ciel à travers le feuillage, je te sens si proche de moi.

 



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