L'Indicible
30 avril 2004
 

La nuit, la pluie, la nuit

Toute grise la pluie, toute froide aussi et je n’ai plus de chaussettes, j’ai un peu mal au ventre, trop de stress et trop de nuits sans dormir.
Pourtant j’aime écouter les filles chanter, c’est tellement beau des femmes qui chantent la nuit et le matin quand elle dit qu’elle veut mourir j’ai envie de ne plus entendre de rester dans ma bulle pour toujours, j’ai peur et pas bonne conscience, je ne sais pas quoi faire quand elle veut mourir.
Je sais trop que parfois tout se brouille, je ne comprends plus rien à rien je dis des choses extravagantes qui affolent et je fais aussi des choses folles qui déconcertent
Je ne sais plus où j’habite plus où je vais quand tu ne me parles plus, je ne dors pas la nuit, je ne te cherche même plus, je sais juste que tu es très loin de moi, je ne compte plus,je me demande ce que je fais, je monte et descends des escaliers, fume encore et mange aussi, j’erre sans errer , je colle des bouts de papier que je coupe au cutter, je fais le monde en miniatures où des lèvres s’éloignent de bouches offertes où les yeux regardent ailleurs d’autres cieux .
Aurélia m‘amène des fleurs avec un sourire si grand que tout s’allume même les lumières de derrière et je reçois un livre e t des mots si doux, je n’ai pas à me plaindre, ce n’est pourtant pas mon anniversaire, il y a des jours comme cela où tout se côtoie, il y a des jours comme cela où tout continue.
Il y a des jours comme cela où je monte et descends; où ton regard me brûle tout le temps, où mes profondeurs se noient dans tant de mer, tant d’eau,et quand je t’aime la nuit toi qui es parti si loin, loin d’ici, je t’aime, cela passe du gris au bleu sombre cela traverse tous les bleus, oui quand je t’aime la nuit je t’aime tellement plus.
Je ne te savais pas si fragile, je ne me savais pas si petite.

 
26 avril 2004
 

déjà vécu le moment

Comme l’impression d’avoir déjà vécu le moment, lumière tendre doucement chaude traversant les feuillages verts, les filles sautent, rient, elle dit " prenez moi la main les filles " je descends les marches de pierre, sourire de Malika, nos yeux brillent, complicité exquise, déjà vécu le moment, et quand elle appelle Antoine tout en sautant rebondissant, cheveux sauvages au vent, mouillés de sueur au rythme des sabots des chevaux, j’appelle aussi Antoine, Antoine, ça déchire le ciel, la lumière des lilas et fend le cœur, on est les seules à l’appeler comme cela, l’impression d’avoir déjà vécu le moment, rond magique dans le cercle des fées, juste un moment extatique, juste un instant.

 
24 avril 2004
 

au bord des lèvres

Il y a certains mots, ils restent collés à la bouche, à la peau, à la mémoire, le mot lèvres est de ceux-là, les lèvres peintes, juste jointes, rouges,douces, lèvres collées, cherchées, trouvées et encore perdues, ces lèvres dont jamais on se lasse, encore y revenir à cette bouche, à ces mots, lèvres gourmandes, j’en veux encore, j’en veux encore des mots de ta bouche sur mes lèvres.
Je les écoute encore de loin tes mots, tu ne me vois pas, je pense j’en ai assez, comment tu es et cela ne m’intéresse plus, presque plus mais quand même juste encore un peu de tes lèvres sur ma peau, un peu de tes bras lianes dans mon dos, tes longs doigts sur mon ventre, ta voix là près de moi, un peu de toi juste une fois.
Et tout cela suffit, ce n’est pas du tout raisonnable dit la foule toute houle alors je cours vers Léo et avec lui je peins avec le pinceau chinois aux longs poils, je peins les feuilles, les lèvres et les corps et des mots se cherchent dans la mémoire.
On ne peut pas toujours être en résonance.
Les doigts sur le piano courent plein vent, la chanson fleuve roman par la fenêtre à tout va, à tout vient, c’est pour toi encore une fois.

 
22 avril 2004
 

On ira toujours

L’orage violent, l’eau pénètre par les fissures, les failles dans le toit, il manque toujours il manque, ils sont là, on chante les chants traditionnels africains, les chansons françaises et anglaises, les voix vibrent dans les pierres parmi les éclairs dans le noir de la nuit, dansent les bougies, la maison frissonne, les violons tziganes le piano, Noa sourit chante et danse aux anges.
A l’heure de dormir je l’appelle, elle dort,je la réveille , je lui explique ma peur (je n’aime pas ma peur , la regrette, la balance au loin ) et que toujours elle écrive comme elle veut, elle comprend et moi je comprends et pour conclure elle dit que j’ai raison et je lui dis que c ‘est elle qui a raison, je ne sais si on avance comme cela mais sûrement on avance e t on ira toujours plus au fond retrouver le goût de leurs lèvres, des fragments de la peau, une voix, la voix , sa voix peinte dans les plis du cœur , on ira toujours amantes folles , amoureuses de l’amour qui jamais ne finit de vibrer nos corps , on ira toujours jusqu’au bout de la vie.

 
21 avril 2004
 

C'est fini !

L’histoire sans fin est finie, l’âme et le cœur sont touchés, restent des traces dans les cendres, des mots qui s’étirent s’entrechoquent se cognent fusionnent et tombent à plat sur la terre, cela allait au-delà à travers les mers les temps et les âges, cela venait de si loin de si longtemps que même la mémoire ne se souvient pas.

 
19 avril 2004
 

Il est magnifique simple et beau, tu as raison, je porte la robe rouge sous la pluie triste et froide, un homme sourit ses yeux brillent je reste indifférente.
Son âme est vieille comme l’art comme l’amour très vieille et quand j’aime j’ai dix ans, cent ans, mille ans .

 
15 avril 2004
 

Renouer avec la renouée

Dès le premier instant je savais, je savais le mouvement, je savais la sensibilité intouchable, inviolable et touchée dès le début, je savais le noir, l’obscur, l’ombre, le sourire enchanteur, l’enchantement, je savais les couleurs diffuses étalées et puis encore.
J’ai vécu la rencontre, l’évidence et puis le trou béant ouvert le creux où tout s’engouffre, la béance attirante et puis le rien d’après.La rencontre évidente saute aux yeux, au regard et à la peau tellement forte, fusionnelle, émotionnelle.
On avait une histoire commune la mort, la mort pour les mêmes raisons de surcroît, presque la même mort la même histoire et évidemment jamais la même mort la même histoire. Cela rapproche et éloigne trop de ressemblances cela devient effrayant même si cela réconforte.

C’est peut-être cela faire le deuil le laisser respirer en dedans, endosser sa peau fibre de laine collée à la mienne et puis sourire, c’est si doux et si chaud.
Faire le deuil ce n’est pas l’oublier, c’est le laisser habiter en dedans, vivre dans les coins les plus reculés, le laisser glisser dans les rivières secrètes là où c’est bon.
Déjà vécu le temps qui s’arrête à la blessure trop grande, trop insupportable, trop omniprésente, le temps s’arrête et le corps aussi, fantôme de toi-même. Où es-tu à l’intérieur, tu n’existes plus, la petite fille qui rit et saute partout. où est-elle ? Déjà vécu cela et surtout ne jamais le revivre, ne plus jamais s’arrêter de respirer, toujours la faire sortir, d’abord avec des mots qu’elle griffe, gratte les feuilles à n’en plus finir, qu'elle sorte du trou.
Le jour où elle sort du grand trou dans la terre, la cajoler, la couvrir de tendresse et d’amour, lui donner place parmi les enfants du monde, c’est l’évidence, lui donner force et courage avec les mots c’est plus facile, c’est un moulin ça broie, ça remue en dedans ça dégouline farine liquide eau sang, laisser s’étaler partout, peu importe le magma, la consistance que cela sorte beau ou pas beau, c’est vital.. Manger ce pain-là et nourrir après et lui promettre plus jamais dans le trou, plus jamais coincée, étouffée plus jamais tue.
Ecrire cela change en dedans, c’est le plus important pour vivre, survivre, c’est ce qui bouge dedans. Libre dedans, des ailes dans les vents à l’intérieur, des mots liberté pour voler plus haut que leurs attentes, leurs préjugés, leurs manières d’être au monde.

 
12 avril 2004
 

Renouer

Il y a eu la renouée aux oiseaux il y a longtemps avant la rencontre dans l’été brûlant, l’homme aux yeux verts et au chapeau noir, nos nuits sur la lune les seins nus, nos rires, nos silences e t nos larmes dans le bleu de l’aube. Et pour te faire sourire hier soir j’ai mangé des cèpes avec le dompteur (il a renoncé à me dompter et m’apprécie comme je suis maintenant) et nous sommes devenus très proches et complices.

Il y a eu sa mort, sa musique, la mer qui manque toujours, les bateaux que l’on attend et qui ne rentrent plus, le bleu aux voiles blanches et sa voix qui me hante encore la nuit, je mêle toutes les voix, elles grimpent mon dos la nuit, envahissent ma nuque et s étalent dans mon cerveau, chansons mélancoliques, parfois j’écris, je me rappelle chaque intonation chaque mot sauf quand cela fait trop mal j’oublie, il y avait lui, ses yeux plus lumineux que le plus beau des ciels, dans ce bleu- là j’ai découvert tout l’amour du monde et c’était sans pareil, c’étaient les plus beaux yeux de ma terre, c’étaient vagues et surf à volonté, et Noa plonge dans l’avant, elle repasse cette vidéo où il joue et je ne peux m’empêcher de regarder la bouche ouverte, scotchée devant l’écran, je nous trouve jeunes et beaux, il est sublime et son regard affligé quand l’autre guitariste se trompe d’accords et comment il sourit parce qu’il est généreux et comment les filles lui sourient, il plaisait tant aux femmes, envie de l’embrasser, de le toucher, envie d’avant, Noa dit que les musiciens manquent et qu’avant toujours il y avait des musiciens ici, oui avant toujours mais c e n’est plus comme avant, bientôt les jolis sons et les jolies voix vont revenir, et ce ne sera pas comme avant, ce n’et jamais comme avant.
Encore cette semaine deux personnes ne savaient pas qu’il était mort, je leur dis et ils sont gênés, ils s’excusent, s’excusent de quoi je me demande, la mort dérange et effraie, je veux bien parler de la mort tout raconter et tous les changements et comment cela arrive et qu’il faut y penser, se préparer et je ne dis rien parce qu’ils partent ou fuient, je comprends j’étais comme cela avant.
Aujourd’hui je renoue avec le jardin des piqûres d’orties plein les bras, des épines dans les doigts, je nettoie désherbe, les machines ne marchent plus, les oiseaux chantent et construisent un nid là où l'on dormait, il manque.

 
09 avril 2004
 

A quoi t'écris quand tu penses?

A quoi tu penses quand t’écris?
A quoi tu penses quand tu danses?
A quoi tu penses quand tu peins?
A quoi t’écris quand tu penses ?
A quoi tu danses quand tu penses ?
A quoi tu peins quand tu penses ?
Et Noa regarde les photos, danse et parle tout le temps et Noa me déstabilise avec ses questions compliquées ou beaucoup trop simples.
Demeurer dans le flot du monde, ne pas s’accrocher au rocher, laisser venir, cœur et pieds nus.

Tu commences à désespérer que je n’écrive plus et tu n’oses le faire, alors ose please ose.
Revenir écrire là, pouvoir tout écrire et puis laisser tomber, à quoi ça sert d’écrire sur le web?
Et se foutre de tout, continuer, arracher les mots les glisser là ou ailleurs, toujours à la limite de, à la lisière d’un corps écrit, écriture, rature, refaire le monde intérieur , survivre, naître encore nouvelle transformée.

La nuit je psalmodie dans le corps des draps.
La nuit je lui laisse sa place, grande, vide, blanche, transparente.
Je sens encore son corps chaud la nuit.
La nuit je délire que les caresses revivent, que les soupirs me traversent encore.
La nuit je le dessine dans les carnets qui envahissent le lit.
La nuit je compte les galets, je les touche avec les lèvres bouche à bouche, pierre contre pierre dans les murs blanchis.
La nuit fidèle à la lune, à la lumière jaune, au halo blanc autour j'arpente les pièces du monde et lui souris.
La nuit sur le ventre ou sur le dos je reconstruis tout.
La nuit je prends sa main, emmêle ses longs doigts doux.
Je crie encore que cela dure qu’il revienne et je m’endors dans ses lèvres à lui.

 
03 avril 2004
 

L’amour fait peur

C’est le dehors qui ouvre en dedans les portes, les tiroirs, la mémoire, le cœur, le corps ouvrir en dedans avec la lumière du dehors, de l’ombre aussi, de l’éclat d’une vie, d’une couleur, d’un caillou posé là, d’un bâton, un bout de bois, une feuille, la soie rouge d’un coquelicot, un pétale bleu pâle juste envolé, une bougie dans le creux d’un mur surgissent alors l’enfoui, l’insondable, l’évidence.
C’est le dehors avec ses douleurs, ses coups dans le ventre, ses impuissances et ses nuisances, plonger en dedans, chercher creuser avec les mots, les pinceaux, les plumes, les papiers, griffer, écorcher à vif, écrire les mots magiques rencontrés, volupté, vibrer avec les papiers d’ailleurs, de l’orient mythique, se mêler à l’humain, aux mondes et creuser toujours jusqu’au mal, couler la peinture dans la plaie, badigeonner de couleur l’amour qui fait peur, les blessures trop vivantes.
Tracer son empreinte sur la ligne du monde avec le sang rouge la sève des pinceaux mille fois trempés dans l’encre des peines et des lamentations, ouvrir les fenêtres vers dehors, entrer l’air, chasser les diables, les démons, les prédateurs.
Arriver à cette paix-là, ne plus sentir le mal au cœur, la tête qui tape, le souffle étouffé, l’incompréhension destructrice, arriver là sur une page word pleurer encore.
Rassembler d’un coup de pinceau le corps fragmenté pieds jambes et bras en morceaux, pièces détachées on the floor, fracturés sexe seins par terre, réunir avec des mots l’en dedans au dehors, réunir et aimer encore le chant de l’oiseau, le sourire de cet enfant-là, le blanc de l’amour à inventer.

 
01 avril 2004
 

Gratuit le désir, pas d’argent, d’investissement, de plan à long terme, juste la peau, la chair près de, frôler, effleurer, toucher, brûlure, feu, incandescence rouge en flammes et en fièvre longtemps encore après, le désir fulgurant, la foudre, rien à comprendre juste électrique, et la blessure mortelle, empoisonnée à l’excès.
Déménager les lits ailleurs dans d’autres terres lointaines, les petites filles trop sages toutes serrées collées contre le mur, souriantes, bien coiffées, les embrasser, leur donner liberté, échappez-vous, grimpez les arbres, courez, cavalez, vivez jusqu’au bout les chevauchées folles, vivez espiègles, effrontées et fougueuses.
Mourir les garçons qui font mal, mourir en dedans, pas d’espace, pas de place.
Il y avait limite à ne pas dépasser, limite grande immense parce que liberté intérieure, fondamentale, de base, mais là c’est "out of order", odieux. On peut toujours se demander comment on en est arrivés là et trouver des excuses, on trouve toujours des excuses et là ce sera sans les gants.

Il y a le reste plus grand que tout, les fleurs dignes et superbes dans les cendres, un silence minéral qui chante.

 



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