L'Indicible
23 mai 2004
 

Tu caresseras mes cheveux

Il y a leurs mains, leurs voix qui me font rêver et fantasmer à mourir, et ce matin l’herbe est tondue, c’est Angélina, une fée en robe rouge et en danses, elle balance au feu de nos âmes, légère elle est venue, a tondu et moi je peignais avec Léo et le soir je rejoins Eva, ses projets fous, du bonheur à chaque mot, un départ sous les étoiles, des vins capiteux et chers, un nouveau jardin, de nouveaux livres, toutes ces premières femmes, ces femmes originelles qui se donnent à la vie, à la mort sans concession avec passion et amour, là je me sens bien, je suis chez moi et on boit du thé blanc, on mange des patates douces, on discourt, on parcourt, avec elle on galvanise tout, les mots, la peinture, le théâtre, les projets, les rêves, elle me dit tu viendras en Italie, et je dis oui, oui j’irai partout où le s femmes créent, donnent leur corps et leur âme, partout où les femmes donnent leur vie pour empêcher l’art de mourir et l’amour aussi.
Je m’enveloppe d’une joie intense, je m’enveloppe de l’amour de toutes ces femmes, et ta voix m’a encore traversée, transpercée, m’a encore bouleversée au plus profond, m’a laissée tremblante dans le matin, femme fragile enchevêtrée dans les lianes, dans le filet de tes mots , j’ai tant de mal à comprendre quand mon cœur bat si fort, je demeure ce corps en éloignement de toi, ce corps qui a perdu tes bras, ce corps en abandon qui se heurte aux grands murs de Saturne et se réchauffe à l’enthousiasme de Jupiter, mon corps en empreinte de tes mains, en attente de notre chemin, d’un autre chemin , mon corps s’accroche au fil, au fil long comme un fleuve, au fil qui s’entortille autour de mon âme, à la soie de ta voix sous ma peau profonde.
Tu peindras nos corps nus sous la lune, je te raconterai les secrets des étoiles, tu caresseras mes cheveux, je lirai dans tes yeux.

 
18 mai 2004
 

Dimanche sacré

lotus aux mille fleurs
Les arbres,le haut des arbres, la cime, on y voit le ciel bleu, un vent doux sur les joues, c’était évident et sacré, divinement sacré, la foule or et rouge, la foule comme tout le monde, or et rouge,le vent dans les voiles, le souffle bat , rythme les couleurs, je suis avec M, je suis définitivement et si tendrement liée avec mes amies québécoises, ad vitam aeternam , et toujours étonnée par ces coïncidences (elles me donnent goût à écrire) et les bouts de bois polis par les vagues, on s’amusera à les peindre comme des enfants.

 
15 mai 2004
 

Jungle

Le jardin est une jungle, les herbes immenses éraflent mon visage, des orties, des chardons, je cherche les fleurs, les oignons plantés à l'automne, des arbres nouveaux sont nés déjà trop grands, des frênes, des chênes, les sauges, les roses nouvelles sans épines partout regorgent de parfums, quand O arrive, j’abandonne le jardin, partout son absence crie, je mange avec les garçons, écoute leurs rêves, leurs histoires d’amour avec les filles, ils sont aussi compliqués et subtiles que nous, je me prépare pour aller au théâtre, de la douceur sur ma peau, de l’eau des fleurs, des huiles des plantes, j’ai lu "la femme qui attendait" d ‘Andrei Makine, j’ai une grande déchirure en dedans le cœur et je n’attends plus, je suis légère dehors.
Je m’abîme à mes désirs et à mes rêves je croise une ambulance qui fonce vers la ville, je m’effondre, je rentre les musiciens sont sortis, je ne suis pas faite pour vivre sans musiciens, je veux partir loin très loin d’ici, et Noa me manque, elle vient de partir et déjà elle manque, chanter avec elle tous ces chants que l’on découvre, les chansons romantiques, poétiques et même politiques, les chants indiens, elles manquent toutes les filles, Aurélia, Noa, Lucie, Annie et les autres si elles étaient là, on brancherait les micros on chanterait très fort et même quand on fausse ( on ne fausse presque pas ) on continuerait de bonheur.
Je marche sans toi, je meurs d e toi, je ne savais pas que ce serait si dur sans toi, je pleure, tu manques trop, les autres garçons ne te ressemblent pas, les autres garçons ne me comprennent pas.
Elle a des yeux verts, des cheveux rouges, un nez vers le ciel,elle chante en indien aussi, elle s’appelle Chloé- Sainte-Marie, elle me sauve ce soir, je tente de recopier une chanson, merci Chloé.
"Mishapan Nitassinan
(Que notre terre était grande)
Coaticook Mazatian Manitou Mégantic
Manouane Ivuivic Mascouche Maniwaki
Saskatchewan Shispaw Matawin Windigo
Kamouraska Témiscamingue Copan Chibougamau
Mishapan Mishapan
Mishapan Nitassinan
Québec Manicouagan Hushai Matapédia
Tadoussac Guanahani Chicoutimi Arthabaska
Natashquam Magog Mexico Shawinigam
Matane Mishigan Wyomoing Nebraska
Mishapan Mishapan
Mishapan Nitassinan
" Je continuerai une autre fois, désolée, c’est très beau, tout le disque est superbe, elle a une belle voix et elle m’inspire, elle chante contre le dos du vent:
Je marche à toi je titube à toi je meurs de toi
Lentement je m’affale de tout mon long dans l’âme
Je marche à toi je titube à toi je meurs de toi
Je marche à toi je titube à toi je meurs de toi
Et aussi
Je n’attends pas la fin du monde
Je t’attends
Elle chante même "la maudite chamaille" et "j’habite une joie très abîmée de douleur", et
Inuugama
Inuugama
Inutuinacq
Inuuvunga
et ainsi elle a tout dit et je remercie la Québécoise de mon pays, Indienne brune aux yeux bleus à l’accent de là-bas pour le cadeau.

 
10 mai 2004
 

L'écho dans les herbes hautes

J’aime toujours tes bras longs qui enroulent, ta voix qui me saoule, ivre je suis là contre toi, ma pensée se dilue, disparaît dans le mouvement fou de nos corps, mon souffle s’accorde au tien, à ta peau, la force attirance, oui c’est ainsi, je ne résiste pas, tu ne résistes pas, chavirés nous sommes dans l’étreinte, nous allons au plus fou de nous, c’est doux, c’est violent, c’est tout, c’est nous.
J’ai tout mêlé les couleurs, ton regard et l’encre de la terre, j’ai tout voilé, trop de larmes au bord du fleuve coulaient encore, j’ai même crié, la voûte s’est affaissée, l’enfant échappé, et je ne savais plus chanter, elle est venue de si loin, tant de mer, tous ces bleus si pâles comme les veines au bord de ton cœur, le blanc derrière le bleu délavé de toi, nos lèvres à l’abandon, j’ai tout tremblé de toi.
Elle pleure encore, tant de désespoir dans une chambre et tu ne me parles pas.
Tes jambes si longues, tant de pas, tant de bras dans tes pas, de marches silencieuses sans moi, quand elles pénètrent mon ventre, je sais que jamais je n’en verrai le bout, la fin et les lumières des allées, des bosquets, des fontaines inondent notre absence, et c’est la mort dans tes bras qui réveille la mienne, il y a si longtemps.
Et comment ai-je pu penser que tu laisserais échapper de ta vulnérabilité, que tu donnerais ta faiblesse, les bougies toutes flammes pour nous au linceul de nos mots, à l’embouchure de nos lèvres, aux cris de nos draps, mais comment rester libres dans le feu fou de l’étreinte, comment rester libres quand nos peaux incendiées crament les papiers ?
A la brisure des mots, quand tout se casse, tout manque, le tout manque, le vide, en l’or remplir le vide, je souris, je pense à vous, c’est plus que fou, tout le monde le sait.

 
07 mai 2004
 

Après l’éclipse de la lune

Parler longtemps pour se retrouver comme avant, mieux qu’avant, se retrouver sans ambiguïtés, secrets révélés, tellement évidents.et pour fêter des roses jaunes, un rosier japonais dont je ne connais pas le nom, petites fleurs abondantes sous les pluies de mai.

Arracher la douleur avec la pince, rouge sang.

Avec elle je danse et je chante, et on parle de la mort tout le temps, recueillement pour lui sous les pluies de nos larmes.

Chercher la trace, le trait, les mots de l’écriture première au troisième millénaire, l’esprit et la matière, des mots, vos mots, nos mots, du bois, de la sève, des feuilles de bambou, de l’encre, encore des couleurs, le calame, les pinceaux, les doigts et le corps et encore me perdre dans les méandres du langage, de la langue, sous influence sans l’influence, amante des couleurs, du parfum des fleurs, la tête dans les étoiles toujours.

 
02 mai 2004
 

La terre est en danger

Tu es prête à tout pour ne pas mourir de cette façon là.
On se prend les mains par derrière, on rit, on cache le trouble sous des phrases légères on se reverra sans la poussière.
Cela serait désespérant cette course aux mots à la vie, cette course pour ne pas mourir, cela ne m’enchante pas de ne pas dormir dans tes bras, c’est toi qui l’as dit ce n’est même pas moi, moi je me suis tue, blanche, nue et pâle, noire, sans mots , je me suis tue, ai tout ravalé en dedans tu comprends pas, pourtant tu comprends les couleurs de l’Irlande toujours dans la brume après la pluie, la lumière ruisselle dans les yeux des enfants,sur les trottoirs dans les rues et dans les quarante verts et tous au pub, la Guinness à flot, la pluie, l’eau, la mer, de partout on peut la voir, entre les pierres, parmi tous les verts, dans tous les vents on y retournera , tu me donneras la main, on se laissera envahir par l’ambiance, immergés en plein dedans on remplira nos ventres des chants à l’étoile, je ne t’ai pas tout dit, pas eu le temps, je n’ai pas su dire pour que tu comprennes, nos chemins se ressemblent on est de la même famille, nos sangs identiques rouges, on a les mêmes failles c’est terrible, cela ne m’enchante pas que l’on ne dorme pas dans le même lit, elles s’appellent Rachel, Jeanne, Marie, Eve, elles ont des noms qui résonnent, elles dorment dans ton lit, elles s‘appellent Aurélia , Annie, Bérénice, Cassandre, Ophélie, Juliette, Antigone, elles s’appellent Ophélia , Noa, Cerise, Sophie, Caroline, Florence, elles appellent et c’est dans le ventre que prenait la lumière, oui même dans le noir, dans le vide, il y a encore une étoile et l’enfant mort renaît, çà ne m’enchante pas toutes ces nuits et ces soirs, ça ne m’enchante pas, je reviendrai.

 



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